[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] Contrairement aux troubles de l’hémostase primaire (thrombopathie, thrombopénie, déficit en facteur von Willebrand) caractérisés par des hémorragies essentiellement cutanées et muqueuses, le patient hémophile développe des hémorragies profondes, affectant notamment les muscles et les grosses articulations. En cas d’hémophilie sévère, 90% des épisodes hémorragiques concernent le système musculo-squelettique et 80% les articulations (4). Ces hémarthroses sont généralement qualifiées de spontanées parce qu’elles se produisent sans qu’aucune cause ne puisse être clairement identifiée et touchent habituellement une articulation à la fois. Chez les hémophiles sévères, les premières hémarthroses se manifestent à partir du moment où le système locomoteur est très sollicité, c’est-à-dire à l’apprentissage de la marche. En cas d’hémophilie sévère et en l’absence de traitement, les patients peuvent présenter jusqu’à plus de 30 hémarthroses par an.
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] Les hémarthroses constituent des manifestations hémorragiques typiques de l’hémophilie sévère. En effet, les hémarthroses ne sont classiquement pas observées chez les patients présentant des troubles de l’hémostase primaire telles que les maladies plaquettaires et le déficit en facteur von Willebrand. Seuls les patients présentant un déficit complet en facteur von Willebrand sont à risque d’hémarthrose dont l’apparition est favorisée par le déficit en facteur VIII qu’entraîne l’absence de facteur von Willebrand.
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] Si l’hémophilie est une maladie hématologique caractérisée par un déficit partiel ou complet du facteur VIII ou IX de la coagulation, ses complications hémorragiques affectent avant tout le système musculo-squelettique. Les hémarthroses représentent en effet les principales complications de cette maladie. A long terme, elles sont responsables d’une arthropathie chronique particulièrement invalidante. Outre l’administration de concentré de facteur de la coagulation généralement confiée à l’hématologue, la prise en charge des hémarthroses aiguës et surtout l’arthropathie chronique requièrent une étroite collaboration avec le chirurgien orthopédiste et/ou le physiothérapeute. Ce binôme entre le spécialiste du sang et de l’appareil locomoteur est indispensable pour prévenir efficacement les hémarthroses, gérer les épisodes aigus, apprécier l’état articulaire des patients hémophiles, et surtout traiter l’arthropathie chronique.
Les procédures chirurgicales doivent être réservées aux patients présentant une atteinte articulaire sévère et pour lesquels les mesures conservatrices ont échoué. En outre, les bénéfices de la chirurgie doivent supplanter les complications qu’elles peuvent susciter (infections, neuropathies et hémorragies).
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] En phase aiguë, la première mesure thérapeutique consiste en l’injection de facteur de coagulation dans les deux heures suivant le début de l’épisode hémorragique. La dose de facteur classiquement recommandée est de 25 à 40UI/kg de FVIII et de 50UI/Kg en cas d’hémarthrose sévère (2). Plusieurs injections espacées sont généralement requises. L’articulation sera immobilisée en position fonctionnelle durant les 2-3 premiers jours. Une compression par bandage élastique pour limiter le gonflement et l’application locale de cryothérapie à intervalle répété sont des mesures efficaces. La cryothérapie induit une vasoconstriction et par conséquent réduit l’extension du saignement et diminue la douleur. Il est recommandé de laisser la poche de glace 5 à 10 minutes, 3-4 fois par jour, en évitant le contact direct avec la peau.
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] Il est souhaitable que tout patient présentant une hémophilie sévère soit suivi par un spécialiste de l’hémophilie à raison d’une à deux consultations par an. Pour les patients présentant un déficit modéré ou mineur, des visites de contrôle annuelles sont également indispensables.
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] La chirurgie chez le patient hémophile requiert des précautions qu’il est impératif de respecter. Elle doit être faite sous couverture d’un traitement substitutif, par un chirurgien expérimenté, dans un centre disposant de compétences spécifiques en hémophilie afin de gérer au quotidien et adapter le traitement de substitution. Cette multidisciplinarité est indispensable pour garantir le succès de l’acte chirurgical.
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] Les hématomes constituent l’autre grande complication de l’hémophilie (6). Ces hématomes ne sont pas spontanés mais font généralement suite à un traumatisme, parfois minime.
[Sébastien Lobet et Cédric Hermans - Centre de traitement de l’hémophilie, Unité d’hématologie et d’hémostase, Clin Univ Saint-Luc, UCL, Bruxelles] Un bilan musculo-squelettique complet doit être réalisé chez tout patient hémophile en vue d’établir un état de la fonction articulaire et musculaire et de permettre son suivi en consultation (2). Il est recommandé que les articulations d’un patient hémophile soient évaluées tous les six mois chez l’enfant et au minimum tous les ans chez l’adulte.
Ortho-Rhumato Vol. 23 N° 1
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